H&M vs Zara : décryptage de leurs stratégies

Si l’Alliance du Commerce se réjouit des résultats de l’été 2022, elle pointe aussi le climat incertain du second semestre. Les marques et enseignes doivent encaisser la hausse des coûts énergétiques, de production et d’exploitation, en plus de l’inflation. Et côté santé, les autorités annoncent s’attendre à une 8e vague de covid-19 à l’automne.

Face à ces défis, il est intéressant de se pencher sur deux acteurs majeurs du marché que sont H&M et Zara et d’effectuer un comparatif quant à des stratégies très différentes.

L’opportunisme comme point de départ

Le point commun entre les deux enseignes est la saisie d’opportunités par leur fondateur.

En ce qui concerne H&M, Erling Persson a créé le premier magasin en Suède en 1947 sur un concept importé des Etats-Unis ; il s’agit d’un gros magasin vendant des vêtements « pour elles » (Hennes) à bas prix. 19 ans plus tard, il rachète un stock de vêtements masculins qui s’appelle Mauritz.

Amancio Ortega Gaona débute dans les affaires avec une boutique de lingerie en 1963. Il ouvre le premier magasin Zara en 1975 pour écouler ses surstocks liés à l’annulation par un client d’une grosse commande.

En 1990, Stefan Persson le fils d’Erling devient PDG. Les magasins s’ouvrent alors à l’international : en 1992, H&M ouvre son premier magasin en Belgique. Le 25 février 1998, H&M inaugure son premier magasin en France. C’est un succès immédiat et l’enseigne ouvre alors 11 points de vente en 18 mois.

Zara quant à lui ouvre son premier magasin en dehors d’Espagne en 1988 à Porto. New-York et Paris suivent en 1989 et 1990.

Des stratégies globales très différentes

H&M
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H&M utilise le marketing de massetige (mass market + prestige) pour toucher sa clientèle. La marque propose une large gamme de vêtements qui s’adressent à une grande partie de la population.

Pour augmenter ses ventes, elle peut s’associer à de grands créateurs lors de partenariats médiatisés.

Les fondamentaux de la société sont :

  • Des stylistes « maison » qui créent les collections
  • 800 fournisseurs répartis à travers le monde
  • Une logistique très performante
  • Une forte culture d’entreprise favorisant la promotion interne
  • De gros investissements en communication (4% du CA)
  • Une stratégie RSE très développée grâce à l’utilisation de coton bio, la mise à disposition de containers pour la récolte de vieux vêtements envoyés à des associations ou en recyclage, le recyclage ou le don des invendus, l’utilisation d’ampoules basse consommation dans les magasins
  • Une stratégie de distribution exclusive : l’exclusivité de la vente est accordée à un point de vente appartenant à la marque dans une aire géographique déterminée.
Zara
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 Zara appartient au groupe Inditex, leader sur le marché du textile.

Le concept de la marque repose sur quelques règles d’or :

  • Coller aux tendances des podiums
  • Susciter l’envie des clientes grâce à des collections flash et limitées : aucun article ne reste plus de quatre semaines dans le magasin et chaque article n’est produit que 10 à 15000 fois
  • Être en phase avec les désirs de la clientèle grâce aux remontées terrain sur ce qui se vend ou non : si un article ne se vend pas correctement la première semaine, il est retiré de la vente et remplacé par un nouveau.
  • Aucun investissement massif dans la publicité (0,3% du CA) : pas de coups médiatiques, Zara se sert de ses vitrines identiques partout pour communiquer son image de marque.
  • Une centralisation importante : presque toutes les phases du développement d’un produit sont gérées par la maison mère (50% des produits sont manufacturés en Espagne, 26% dans le reste de l’Europe et 24% dans le reste du monde)

Forces et faiblesses

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Ces deux enseignes aux stratégies très différentes ont des forces et des faiblesses propres à chacune.

H&M n’a pas d’usine de production et se trouve dépendante de ses très nombreux fournisseurs. Les délais pour mettre un produit sur le marché sont de 3 mois en moyenne et selon les usines, la qualité peut être jugée moyenne. Toutefois, la rentabilité semble être meilleure.

Zara ayant centralisé sa fabrication en Galice, les délais vers les magasins sont très courts : design de nouveaux produits et acheminement sous 4 à 5 semaines. La forte rotation des collections permet à la marque d’adapter son offre en un temps record : chaque année, environ 11000 articles différents sont produits contre 2 à 4000 pour H&M. Cela permet de n’avoir aucune accumulation d’articles qui ne se vendent pas.

En revanche, Zara prend un risque énorme en n’ayant qu’un centre de fabrication. Le modèle très eurocentré aboutit à une saturation des magasins en Europe où les coûts des points de vente sont parfois supérieurs à leur recette. A ceci s’ajoute le taux de change qui rend les prix hors zone euros très peu attractifs voir inadaptés au marché local.

Dans un marché très malmené et en mutation rapide, il conviendra de voir quelle enseigne saura le mieux répondre aux exigences : H&M très décentralisé dans sa production, fortement investi dans une démarche RSE et communiquant beaucoup, ou Zara au modèle ultra centralisé et Européen, privilégiant le bouche à oreille et la rapidité d’exécution ?

 

Par Claire Jagodzinski

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Sources :